Face à cette situation particulière, l’activité de Kinésithérapie a été en partie à l’arrêt. Les professionnels de santé ont dû s’adapter.
Comment s’adapter face à une situation de confinement, tout en apportant des soins aux personnes qui en ont le plus besoin ?
Témoignage d’Olivier Lubin, Masseur-Kinésithérapeute et enseignant depuis presque 10 ans à l’IFMK Assas (Paris). Après avoir exercé pendant plusieurs années en cabinet, il se déplace depuis plus de 15 ans au domicile des patients afin de leur prodiguer leurs soins. Le métier de Masseur-Kinésithérapeute à domicile s’adapte aux gestes barrières.
Quel fut l’impact de la période de Covid sur votre activité professionnelle ?
Dans les premiers temps, il a fallu estimer un ordre de priorité dans la prise en charge des patients, situation très difficile dans certains cas. Souvent, l’activité réalisée à domicile est synonyme de grande dépendance aux soins pour le patient et en tant qu’intervenant extérieur, il est capital d’avoir conscience du risque que l’on peut représenter dans la propagation du Covid-19. Néanmoins, il faut aussi se poser la question, sur les conséquences d’un arrêt des soins pendant 1 mois voire plus.
En effet, dès le début du confinement et en respectant les consignes qui ont été données, j’ai dû réfléchir au bien-être de mes patients. Pour certains d’entre eux, arrêter les interventions à domicile aurait été délétère pour leur santé. Dans un contexte où les hôpitaux étaient surchargés, je me devais de continuer en partie mon activité, en mettant tout en place afin de respecter les gestes barrières et ne pas être un vecteur de transmission.
Après évaluation du bénéfice/risque et après plusieurs échanges téléphoniques avec mes patients, dont certains ne souhaitaient pas de soins de peur de la transmission du Covid-19, mon activité a baissé d’environ 60%, en passant d’environ 16 patients par jour, à 6 en moyenne.
Avez-vous souffert du manque de matériel ?
En début de confinement le manque de masques et de matériels de protection a posé problème. Bien que j’aie eu la chance d’avoir très rapidement quelques masques, ceux-ci ne me permettaient de travailler qu’une poignée d’heures par jour dans la semaine.
J’avais la chance de posséder du Gel Hydro Alcoolique et des gants d’avance et d’exercer à côté d’une pharmacie qui en produisait de grande quantité, ce qui m’a permis de faire face dans les premiers temps. De plus, j’ai rapidement commandé et ait été livré des blouses que je revêtais et laissais chez chaque patient, afin de minimiser les risques de transmission.
Quel type de patientèle rencontrez-vous ?
Mes interventions concernent des personnes à forte dépendance. Nous ne parlons donc pas ici d’entorse de cheville bégnine, mais de patients qui vont avoir des difficultés quotidiennes, à se déplacer de leur lit aux toilettes par exemple. Face à ce type de patient, si les soins ne sont pas poursuivis pendant 1 mois voire plus, il y a de fortes chances que leur état se dégrade et qu’une hospitalisation soit envisagée.
A titre d’exemple, je travaille avec une patiente âgée de 94 ans, résidant au 5ème étage de son immeuble sans ascenseur. A chacun de mes passages, je lui fais, entre autres activités, monter et descendre les escaliers de ses 5 étages. Si nous ne le pratiquions pas pendant 1 mois, le temps estimé du confinement à ce moment-là, elle n’aurait pu le faire à l’avenir et aurait perdu tous les progrès et son indépendance relative.
De manière générale, je rencontre tous types de patients. Néanmoins, je travaille majoritairement avec des personnes âgées et des patients présentant de lourds handicaps neurologiques et des maladies neurodégénératives.
Selon vous, pourquoi travailler à domicile peut être un type d’activité professionnelle intéressant ?
Excuser la lapalissade mais les patients qui reçoivent des soins à domicile, c’est bien-sûr parce qu’il leur est impossible de se déplacer et de se rendre en cabinet. Un des avantages pratiques pour le professionnel est la flexibilité de l’emploi du temps : la plupart des patients sont chez eux toute la journée donc il peut-être plus facile de s’entendre sur un horaire de passage, de passer plus tôt pour compenser une annulation de dernière minute, etc. Même si, ayant des patients avec des traitements très longs, mon emploi du temps varie très peu d’une semaine à l’autre. De plus les loyers de locaux professionnels pouvant être très chers dans les grandes villes, cela permet de faire de substantielles économies.
Un autre aspect qui peut être considéré positif comme négatif, c’est le peu de changement de patients et la diversité des pathologies. Généralement les patients sont suivis sur de longues périodes : une personne souffrant de maladie neurodégénérative comme la maladie de Parkinson ou de Sclérose En Plaques, par exemple, va nécessiter des soins de plus en plus importants tout au long de sa vie. Donc l’aspect positif sera le suivi du patient sur une longue période, et ce qui peut être parfois considéré comme un aspect « négatif », serait la récurrence, puisque que concrètement l’emploi du temps et les patients changent peu.
L’aspect réellement différent du cabinet, va être le déplacement au domicile du patient : on entre dans leur sphère personnelle. Cela va permettre de créer une sorte de lien supplémentaire entre le professionnel et le patient. Le revers de la médaille est le manque de moyen matériel. En effet, il nous est impossible de pouvoir utiliser l’ensemble du mobilier et des appareils que nous aurions à disposition au cabinet. Il faut donc s’adapter aux environnements que l’on rencontre.
Enfin, face au confinement que nous avons subi, exercer à domicile m’a permis de maintenir une activité, même si celle-ci fut très réduite, contrairement à mes collègues qui ont été contraint de fermer leur cabinet. De plus, cela a permis aux patients dans le besoin de recevoir tout de même des soins et de maintenir le lien physique.
Enfin face au cas de confinement que nous avons rencontré, exercer à domicile m’a permis de maintenir une certaine activité, même si celle-ci fut réduite. De plus, cela a permis aux patients dans le besoin de recevoir tout de même des soins et de maintenir le lien.